DIG/ Face aux multiples mouvements d’humeur au sein du département des Eaux et Forêts et de certaines prises de décision contestées de la tutelle, le président de l’ONG Brainforest, Marc Ona Essangui, dézingue littéralement le ministre Lee White sur sa méthode de travail empreinte, dit-il, d’amateurisme et de méconnaissance affligeante des textes en vigueur.
Entretien
Direct Infos : Le ministre Lee White a indiqué lors d’une visite à la zone économique à régime privilégié de Nkok que le gouvernement envisage de lever l’interdiction et la commercialisation du Kévazingo. Est-ce une bonne nouvelle pour nos exploitants locaux ou un danger pour la conservation de cette espèce rare ?
Marc Ona Essangui : Est-ce que le nouveau ministre a fait le tour des raisons qui ont milité pour la suspension de l’exploitation et de la commercialisation du Kevazingo avant d’annoncer la reprise de cette exploitation et de sa commercialisation ?
Pourquoi se précipite-t-il sur la relance de l’exploitation sans dire au grand public ce qui s’est passé avec les 357 containers de Kevazingo dont le gouvernement et le parquet ont annoncé la disparition ?
Que cache cette reprise décidée par le gouvernement alors que le peuple attend toute la lumière sur ce que nous avons appelé le kevazingogate ? N’oublions pas que les hautes autorités du pays à l’instar du Vice-Président et un ministre de la République ont été limogés suite à ce scandale.
On ne peut pas d’un revers de main passer l’éponge dessus et reprendre les activités comme si de rien n’était. Il faut arrêter avec cette gouvernance personnalisée de la chose publique.
Il faut arrêter de penser que le Gabon est un désert de compétences. Avant toute reprise d’une quelconque activité en lien avec le Kavazingo, le gouvernement doit nous édifier sur ce scandale sinon nous prendrons nos responsabilités.
En termes de conservation et de protection de nos écosystèmes, comment jugez-vous les actions menées par le ministre Lee White depuis sa prise de fonction ? Quelle est votre analyse critique ?
L’administration des eaux et forêts est bloquée jusqu’à ce jour du fait de l’amateurisme de Lee White et sa propension à concentrer tous les pouvoirs au sein de cette administration.
Non seulement il crache sur les procédures mais pour lui le respect de la loi ne le concerne pas. De la nomination des hommes de paille qu’il peut contrôler à sa guise tant au sein de l’administration des eaux et forêts qu’aux différentes agences en violation des textes, il se croit investi par une mission que lui seul a le secret. Pendant ce temps tout le secteur est à genou.
Il privilégie la répression et les amendes transactionnelles à la pédagogie. Il suffit de jeter un coup d’œil sur le retrait de permis aux opérateurs pour constater la violation des procédures.
Il n y a donc rien de positif dans ses actions ?
Lee White n’est pas un ministre à part. Il laisse l’ANPN en lambeaux et compte rééditer cet exploit au ministère.
Je lui avais adressé une correspondance pour faire l’audit des 10 ans passées à la tête de cette agence nationale. Je voudrais lui rappeler qu’au ministère des eaux et forêts on fait de l’économie forestière avec les outils juridiques existants à commencer par la loi forestière qu’il s’est empressé de retirer du circuit à l’assemblée nationale à son arrivée mais qu’il n’a jamais réintroduite.
On ne fait pas de la conservation. Après 10 ans passés à l’ANPN on se demande comment un pays disposant de 10 parcs nationaux peut être un désert touristique comme c’est le cas aujourd’hui ? Ni l’imposition du certificat FSC à tous les opérateurs forestiers en violation de la loi de la concurrence, ni la police forestière mal orientée qui ne vise qu’à coller des amendes et non d’encourager les bonnes pratiques sur le terrain ne sortiront le secteur forestier agonisant de la crise actuelle.
Il suffit d’interroger les agents de ce ministère en grève depuis des semaines et des opérateurs économiques, même les ONG comme Brainforest, la seule ONG nationale qui dénonce ouvertement les dérives de Lee White tant à l’ANPN qu’au ministère pour se rendre compte du désastre.
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Entretien réalisé par Direct Infos
