La Chronique
de
Jérémie Ayong Nkodjie Obame*
« Cette semaine, le baril de Brent se stabilise autour de 64 dollars, le WTI près de 60 dollars. Des niveaux qui témoignent d’un marché hésitant, ballotté entre les craintes d’un ralentissement économique mondial et les signaux prudents envoyés par l’OPEP+.
Le pétrole respire mais à courte haleine : les tensions géopolitiques, la contraction de la demande et les annonces contradictoires des grands producteurs entretiennent un climat d’incertitude. La moindre secousse peut inverser la tendance.
Pour les économies dépendantes de l’or noir, cette volatilité récurrente agit comme un rappel brutal : sans stratégie claire, la rente pétrolière reste une illusion fragile. D’où l’intérêt du chantier lancé par le Gabon, décidé à réécrire son cadre légal des hydrocarbures.
Le pays s’apprête à séparer son dispositif en deux textes distincts : un Code pétrolier et un Code gazier. Ce choix traduit une ambition nouvelle : mieux encadrer l’exploitation des ressources, attirer des investisseurs solides et renforcer la contribution du secteur au développement national.
Mais l’exercice est délicat. Le futur Code devra trouver le juste équilibre : offrir une fiscalité compétitive sans céder sur la souveraineté, garantir la stabilité juridique sans décourager la modernisation, encourager la production tout en protégeant l’environnement.
La ligne de crête est étroite : trop d’incitations, et l’État s’appauvrit ; trop de contraintes, et les opérateurs désertent. Le Gabon doit donc inventer un cadre agile, capable d’accompagner l’évolution des marchés tout en maximisant la valeur ajoutée locale.
Au-delà des textes, c’est une vision qu’il faut affirmer : celle d’un secteur extractif au service de la transition énergétique et de la diversification économique, non plus d’une simple rente budgétaire. Le gaz, notamment, offre une opportunité stratégique s’il est intégré au mix énergétique national — dans la production électrique, la pétrochimie ou les transports — plutôt que limité à l’exportation brute.
Dans un monde où le pétrole n’est plus la promesse d’hier mais le défi de demain, le Gabon doit refonder son pacte pétrolier : non pour s’adapter à la conjoncture, mais pour la devancer. Car si les prix du brut oscillent au gré des tensions et des annonces, les nations qui fixent leurs propres règles demeurent les seules à transformer la volatilité en levier de souveraineté ».
- Jérémie AYONG NKODJIE OBAME est un dirigeant d’entreprise dans le secteur pétrolier.
- Titulaire d’un Master II en marketing opérationnel (ISEG Lille), il a évolué au sein de plusieurs structures de référence : auditeur chez Alex Stewart International, responsable des ventes chez Total Marketing Gabon, puis directeur général adjoint chargé des hydrocarbures à la Caistab, avant d’occuper des fonctions de direction à la SOGARA et chez Gabon Oil Marketing.
- En 2024, il crée un cabinet d’expertise dédié au secteur pétrolier et Gazier.



