DIG / Dans un entretien exclusif accordé au site Le Point Afrique, Noureddin Bongo, fils de l’ancien président Ali Bongo, affirme avec force n’avoir « jamais détourné un seul franc CFA », malgré une existence marquée par un train de vie somptueux, des propriétés à l’étranger et une influence politique perçue comme illégitime par une large partie de la population gabonaise.
Sa défense repose sur un argument récurrent dans les régimes autoritaires : la dissociation entre style de vie et accès aux finances publiques.
« Je n’ai jamais eu accès à un compte de l’État ni participé à une procédure de dépense », assure-t-il, soulignant que les décisions budgétaires relevaient d’un « comité de trésorerie » présidé par le Premier ministre, sous le contrôle direct du chef de l’État.
Pourtant, dans un pays où près d’un tiers de la population vit sous le seuil de pauvreté, tandis que le Gabon affiche l’un des PIB par habitant les plus élevés d’Afrique centrale, la visibilité ostentatoire du clan Bongo — villas, voyages privés, voitures de luxe, réceptions fastueuses — a longtemps cristallisé la colère sociale.
Paradoxe frappant
-Sur le plan juridique, Noureddin Bongo peut techniquement avoir raison : n’être ni ministre, ni gestionnaire de budget, limite l’engagement pénal.
-Sur le plan politique, son rôle de « conseiller spécial », ses interventions dans les nominations, son contrôle supposé sur les fonds de souveraineté et ses liens avec des entreprises stratégiques ont nourri la perception d’un pouvoir parallèle, opérant dans l’opacité.
Et c’est précisément ce décalage entre légalité et légitimité qui a miné le régime Bongo. Comme le soulignait l’écrivaine gabonaise Angèle Rawiri : « Nous rêvions d’une aube nouvelle, mais nous nous sommes réveillés dans les mêmes ombres. »
Aujourd’hui, alors que le Gabon tente de tourner la page de 56 ans de règne familial, la question n’est plus seulement juridique, mais morale : Peut-on, en tant que membre éminent d’une dynastie au pouvoir, jouir de privilèges extravagants sans assumer une part de responsabilité dans les inégalités qu’ils symbolisent ?
Noureddin Bongo rejette cette responsabilité collective. Mais pour de nombreux Gabonais, le luxe n’était pas qu’un style de vie — c’était un système. Et dans ce système, le silence valait complicité.



