Pétrole en sursis : Entre pression mondiale et défis environnementaux au Gabon

La Chronique

de

Jérémie Ayong Nkodjie Obame*

« Le baril de Brent navigue autour de 64 USD et le WTI aux alentours de 60 USD ce vendredi 3 octobre 2025. Dans un contexte d’offre abondante, la moindre tension géopolitique ou locale suffit à éveiller les spéculateurs. Mais le cas gabonais rappelle que le pétrole n’est pas seulement un actif financier : c’est aussi une responsabilité nationale, sociale et environnementale.

Sur les marchés, les cours se maintiennent dans une zone médiane, après avoir reflété ces dernières semaines la confrontation entre une offre croissante et une demande hésitante. Le Brent, oscillant autour de 65 à 68 dollars, illustre la pression exercée par la hausse continue de la production, tandis que le WTI reste soumis à l’abondance de l’or noir américain. La dynamique de l’OPEP+, qui a décidé d’augmenter légèrement ses volumes dès octobre, vise à défendre ses parts de marché, quitte à fragiliser davantage les prix. Dans le même temps, les incertitudes liées à l’offre russe entretiennent une volatilité latente, laissant planer l’hypothèse de brusques retournements de tendance. Pour beaucoup d’analystes, le scénario le plus probable demeure celui d’un prix moyen du Brent stabilisé autour de 66 à 67 dollars d’ici la fin de l’année, dans une fourchette comprise entre 60 et 70 dollars le baril.

Cette réalité mondiale résonne de manière particulière au Gabon. Le pays a récemment été frappé par une nouvelle nappe d’hydrocarbures sur son littoral, une pollution qui illustre avec force le dilemme des États producteurs. Alors que le gouvernement ambitionne de relancer l’exploration, notamment en offshore profond, afin d’enrayer la baisse de production observée ces dernières années, il doit affronter les conséquences sociales et environnementales de cette dépendance. Relancer la production reste un impératif économique, mais la gestion des risques écologiques devient une condition sine qua non de crédibilité, à la fois pour les investisseurs et pour l’opinion publique.

Cette double exigence traduit une vérité de plus en plus évidente : la valeur du pétrole ne se mesure plus uniquement en dollars par baril, mais aussi en termes de durabilité et de réputation. Une pollution mal maîtrisée peut coûter bien davantage que les revenus immédiats d’une extraction non contrôlée. Le Gabon, pour maintenir sa place dans le concert énergétique mondial, doit conjuguer stratégie de production et rigueur environnementale, transparence et innovation.

En définitive, le marché pétrolier est aujourd’hui en sursis, pris en étau entre une surabondance mondiale et des impératifs de transition. Pour le Gabon comme pour d’autres producteurs, l’avenir se joue désormais sur un équilibre subtil : préserver les recettes indispensables au développement tout en inscrivant l’exploitation des ressources fossiles dans une vision durable et responsable. Le « bon prix » du pétrole ne sera plus seulement celui affiché sur les écrans des traders, mais celui qui permettra de conjuguer prospérité, protection et résilience nationale ».

  • Jérémie AYONG NKODJIE OBAME est un dirigeant d’entreprise dans le secteur pétrolier.
  • Titulaire d’un Master II en marketing opérationnel (ISEG Lille), il a évolué au sein de plusieurs structures de référence : auditeur chez Alex Stewart International, responsable des ventes chez Total Marketing Gabon, puis directeur général adjoint chargé des hydrocarbures à la Caistab, avant d’occuper des fonctions de direction à la SOGARA et chez Gabon Oil Marketing.
  • En 2024, il crée un cabinet d’expertise dédié au secteur pétrolier et Gazier.

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