La Chronique
de
Jérémie Ayong Nkodjie Obame*
Un marché pétrolier sous tension
» Ce vendredi 25 juillet 2025, le Brent s’échange à 69,5 $ le baril, tandis que le WTI s’établit à 66,5 $. Après un début d’année marqué par une volatilité persistante, les cours ont retrouvé une forme de stabilité, soutenus par quelques signaux positifs dans les négociations commerciales entre grandes puissances et par des ajustements de production de l’OPEP+. Mais cette accalmie demeure fragile : en dessous des 70 $ pour le Brent, les marges des grands producteurs se resserrent, tandis que les compagnies de services pétroliers américaines et européennes réduisent leurs investissements.
Les majors face à des marges compressées
Depuis janvier, les résultats des grandes entreprises pétrolières reflètent ce contexte morose. TotalEnergies a vu son résultat net du deuxième trimestre reculer de près de 30 %, tandis que Schlumberger et Halliburton subissent la baisse de la demande en services de forage. La stratégie de réduction des coûts reste le mot d’ordre pour préserver les dividendes et rassurer les marchés. Cette prudence témoigne d’un changement d’ère : le pétrole n’offre plus, à lui seul, la promesse de rendements records sans adaptation aux cycles de prix et à la transition énergétique.
Le Gabon à la croisée des chemins
Pour le Gabon, cette réalité mondiale se traduit par une double pression. La Banque africaine de développement (BAD) prévoit un ralentissement de la croissance du pays en 2025 et 2026, conséquence directe d’une dépendance trop marquée aux recettes pétrolières. Parallèlement, l’exécutif gabonais s’efforce de diversifier l’économie. La rencontre récente entre le président de la République et le PDG d’Eramet illustre cette ambition : le groupe minier s’engage à transformer deux millions de tonnes de manganèse sur le territoire d’ici 2029, une étape majeure pour accroître la valeur ajoutée locale et réduire les exportations de minerai brut.
Diversifier pour mieux résister
La dynamique actuelle impose de penser l’avenir au-delà des barils de pétrole. Le Gabon dispose de ressources stratégiques, notamment dans le manganèse, mais aussi dans l’agriculture et le bois. L’engagement d’Eramet et les projets industriels annoncés doivent être accompagnés d’une vision claire : formation des compétences, amélioration des infrastructures et cadre fiscal incitatif pour attirer les investissements privés. C’est seulement en consolidant ces piliers que le pays pourra amortir les chocs des cours pétroliers et maintenir une trajectoire de croissance durable.
Un pari lucide
Le pétrole, à moins de 70 $ le baril, ne peut plus être l’unique moteur de prospérité pour le Gabon. Les initiatives visant à transformer localement le manganèse montrent que la diversification est possible et porteuse d’avenir. L’heure est donc à la lucidité et à l’action : il faut capitaliser sur les opportunités de la chaîne des matières premières, tout en préparant les bases d’une économie plus équilibrée et résiliente ».
- Jérémie AYONG NKODJIE OBAME est un dirigeant d’entreprise dans le secteur pétrolier.
- Titulaire d’un Master II en marketing opérationnel (ISEG Lille), il a évolué au sein de plusieurs structures de référence : auditeur chez Alex Stewart International, responsable des ventes chez Total Marketing Gabon, puis directeur général adjoint chargé des hydrocarbures à la Caistab, avant d’occuper des fonctions de direction à la SOGARA et chez Gabon Oil Marketing.
- En 2024, il crée un cabinet d’expertise dédié au secteur pétrolier et Gazier.



