DIG / Le marteau de la Cour Criminelle Spécialisée de Libreville est tombé, scellant le sort de la « Young Team ».
Si le verdict du mardi 18 novembre 2025 clôt un chapitre judiciaire haletant, il ouvre surtout, pour les observateurs économiques, le dossier colossal de la reconstruction financière du Gabon.
Au-delà des peines de prison, ce procès a agi comme un révélateur brut d’une prédation systémique chiffrée à plus de 4 000 milliards de FCFA.
Le verdict : Une distinction nette entre « Exécutants » et « Architectes »
La Cour a rendu une décision qui permet de mieux comprendre l’organigramme de ce système de captation des richesses.
Le noyau dur sanctionné : Ian Ghislain Ngoulou, Mohamed Ali Saliou et Abdul Oceni Ossa écopent de 15 ans de réclusion criminelle (dont 5 avec sursis) et de lourdes amendes.
Économiquement, cela désigne les « signataires », ceux qui avaient la main sur les leviers financiers de la Task Force et de la présidence.
La libération des « administratifs » : L’acquittement ou la libération immédiate de personnalités comme Steeve Nzegho Dieko, Gisèle Mombo ou Jordan Camuset envoie un message important aux marchés : la justice a cherché à punir les bénéficiaires économiques du système plutôt que les simples rouages administratifs ou politiques.
4 000 Milliards : L’anatomie d’un pillage d’État
C’est le chiffre qui hantera longtemps les couloirs du ministère de l’Économie.
Durant les débats, il a été établi que près de 4 000 milliards de FCFA ont échappé aux circuits officiels du Trésor Public.
Pour l’économie gabonaise, cela équivaut à plusieurs années de budget d’investissement « évaporées ». Ce système de « guichet unique » imposé par la Young Team agissait comme un goulot d’étranglement, asphyxiant les PME locales et décourageant les investisseurs étrangers qui refusaient de payer la « taxe officieuse ».
Si la condamnation solidaire de Sylvia et Noureddin Bongo au paiement de 1 000 milliards de FCFA (prononcée précédemment) marque les esprits, le réalisme économique impose la prudence.
Les amendes infligées aujourd’hui aux autres membres (de 10 à 25 millions de FCFA, plus les saisies) sont symboliques face à l’ampleur du préjudice.
Le véritable défi pour l’État sera désormais de traquer les actifs placés à l’international. Ce processus de recouvrement sera long, coûteux et incertain. L’argent du « boire et manger » ne reviendra pas immédiatement dans les caisses pour financer les routes ou les écoles.
Un signal fort pour l’orthodoxie financière
En prononçant ces condamnations tout en relaxant ceux dont les preuves étaient insuffisantes, la justice gabonaise tente de rassurer les bailleurs de fonds internationaux. Ce verdict marque, espérons-le, la fin de l’ère de l’impunité économique et le retour à une orthodoxie financière stricte.
Le message envoyé aux futurs gestionnaires de la chose publique est clair : la signature de l’État ne doit plus jamais être privatisée au profit d’un clan. Reste maintenant à transformer cette victoire judiciaire en relance économique concrète pour le panier de la ménagère.



