DIG/ le Conseil d’administration du Fonds monétaire international (FMI) a achevé, le 17 décembre 2018, les entretiens annuels avec la Communauté économique et monétaire d’Afrique centrale (CEMAC) concernant les politiques communes des pays membres et les politiques communes à l’appui des programmes de réforme des pays membres.
Selon le Fonds, la situation économique dans la CEMAC reste difficile. La croissance économique régionale, qui a ralenti considérablement après la chute des prix du pétrole en 2014, demeure atone et ne s’est pas encore accélérée comme prévu.
La croissance hors secteur pétrolier devrait tomber en 2018 à 1,0 %, contre 2,6 % en 2017. Un rebond plus marqué que prévu du PIB pétrolier (+ 7,3 %) contribuerait néanmoins à une accélération de la croissance globale, de 1,0 % en 2017 à 2,2 % en 2018.
L’inflation s’accélère, mais resterait faible, aux alentours de 2 % à la fin de l’année. La situation du secteur bancaire reste difficile, en raison du niveau élevé des arriérés de l’État. Les prêts improductifs ont continué d’augmenter, pour atteindre 17 % du total des prêts à la fin de septembre 2018, tandis que plusieurs banques continuent de ne pas respecter certains ratios prudentiels.
Les avoirs extérieurs nets de la Banque des États de l’Afrique centrale (BEAC)étaient inférieurs aux prévisions à la fin septembre et devraient le rester jusqu’à la fin de l’année, en dépit de la hausse des prix du pétrole et des efforts déployés par la BEAC et la Commission bancaire d’Afrique centrale (COBAC) pour renforcer l’application de la réglementation des changes.
Cela s’explique, indique le Fonds, dans une large mesure par les retards observés dans l’adoption de programmes appuyés par le FMI en République du Congo et en Guinée équatoriale et dans le décaissement de l’aide budgétaire extérieure qui y est liée.
Par ailleurs, les efforts budgétaires consentis par les pays qui appliquent un programme appuyé par le FMI sont plus ou moins conformes aux attentes. Pour l’ensemble de la région, le déficit hors pétrole à la fin de 2018 devrait correspondre aux prévisions, tandis que le solde global dépasserait ces dernières en raison d’une augmentation des recettes pétrolières.
À moyen terme, il reste prévu que la situation économique et financière s’améliore de manière progressive. Des réformes visant à améliorer le climat des affaires et la gouvernance, ainsi qu’à renforcer le secteur financier, conjuguées à un desserrement du frein exercé par l’ajustement budgétaire et au remboursement des arriérés de l’État, contribueraient à la reprise progressive de la croissance hors pétrole, qui s’établirait à 4 ½ % d’ici 2021.
Le solde budgétaire global (à l’exclusion des dons) serait proche de l’équilibre à compter de 2019, en raison d’une nouvelle réduction du déficit primaire hors pétrole. La dette publique baisserait sensiblement, de près de 50 % du PIB à la fin de 2018 à moins de 44 % du PIB d’ici la fin de 2020. Une nouvelle baisse du déficit des transactions courantes, à environ 1½ % du PIB en 2018-20 (contre 4 % du PIB en 2017), contribuerait à une accumulation progressive de réserves, la couverture des réserves atteignant près de quatre mois d’importations d’ici 2020.
Ces perspectives reposent sur la mise en œuvre intégrale par les pays membres de la CEMAC et les institutions régionales des engagements qu’ils ont pris, et sont exposées à des risques considérables, parmi lesquels de nouveaux retards dans l’approbation d’accords financiers avec la République du Congo et la Guinée équatoriale, une baisse des prix du pétrole et un durcissement des conditions financières mondiales.
Évaluation par le Conseil d’administration
« Les administrateurs notent que les progrès accomplis dans le cadre de la stratégie régionale ont contribué à éviter une crise immédiate, mais que la stratégie n’a pas encore atteint pleinement ses objectifs : les réserves régionales sont insuffisantes et la croissance non pétrolière demeure atone. Les administrateurs soulignent que l’amélioration de la situation économique et financière régionale à moyen terme dépend crucialement de la mise en œuvre intégrale des engagements pris par les pays membres de la CEMAC et les institutions régionales, ainsi que de l’adoption de programmes appuyés par le FMI par la République du Congo et la Guinée équatoriale. Les administrateurs engagent les autorités de ces pays membres à redoubler d’efforts pour satisfaire aux conditions préalables d’un accord avec le FMI.
« Les administrateurs engagent les autorités des pays de la CEMAC à continuer de mettre en œuvre strictement leur programme d’assainissement budgétaire et de s’attaquer promptement à tout dérapage budgétaire. Cela est essentiel pour reconstituer des amortisseurs budgétaires et des volants de réserves adéquats, et orienter fermement la dette publique à la baisse. Les administrateurs soulignent qu’il est nécessaire d’améliorer la qualité de l’assainissement en renforçant la mobilisation des recettes non pétrolières. Ils soulignent aussi qu’il importe de finaliser et de mettre en œuvre les plans de remboursement des arriérés. Les pays membres doivent aussi appuyer la mise en application de la réglementation des changes par la BEAC et la COBAC, notamment en accroissant la transparence des industries extractives et en veillant à la domiciliation des recettes d’exportation, ainsi qu’au rapatriement et à la cession des avoirs extérieurs par toutes les entités publiques.
« Les administrateurs saluent les mesures correctives qui ont été prises pour s’attaquer à l’insuffisance des avoirs extérieurs nets, notamment le relèvement du taux directeur de la BEAC et la mise en application par la COBAC et la BEAC des limites des positions de change des banques. Les administrateurs saluent aussi les progrès considérables qui ont été accomplis dans la modernisation du cadre opérationnel de la politique monétaire et la rédaction d’une nouvelle réglementation des changes, deux mesures qui, lorsqu’elles seront pleinement effectives, contribueront à renforcer la transmission de la politique monétaire et à ramener l’accumulation des avoirs extérieurs nets en bonne voie.
« Les administrateurs sont d’avis que, après le récent durcissement, l’orientation de la politique monétaire semble adéquate, mais ils soulignent que la BEAC doit être prête à durcir davantage sa politique si nécessaire pour soutenir la stratégie régionale. Ils encouragent aussi la BEAC à continuer de chercher à développer le marché interbancaire, notamment en réduisant davantage l’excès de liquidités.
« Les administrateurs encouragent le secrétariat général de la COBAC à faire du contrôle fondé sur les risques l’axe principal de son plan stratégique pour 2019-21, qui devrait aussi viser à renforcer le cadre et les outils de contrôle, à assurer une résolution plus prompte des banques en difficulté, ainsi qu’à encourager les banques à établir et à mettre en œuvre des plans de réduction des prêts improductifs. Pour atteindre ses objectifs, il sera essentiel de renforcer les ressources humaines du secrétariat général de la COBAC.
« Les administrateurs notent qu’un climat des affaires médiocre et une impression généralisée de corruption continuent de freiner la croissance. Ils encouragent les autorités nationales et régionales à redoubler d’efforts pour rétablir une croissance soutenue et inclusive, et favoriser la diversification, notamment en améliorant la gouvernance, la gestion des finances publiques et la lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme, en promouvant l’intégration régionale et en favorisant le développement des marchés financiers.
« Les administrateurs notent les progrès considérables qui ont été accomplis par la BEAC et la COBAC en ce qui concerne les assurances fournies dans la lettre de suivi de juin 2018 sur les points suivants : i) achever la modernisation du cadre opérationnel de la politique monétaire et ii) soumettre la réglementation des changes révisée à l’adoption du comité ministériel de l’UMAC, ces deux mesures étant attendues d’ici la fin de 2018. Ils sont d’avis que la BEAC et la COBAC ont pris des mesures correctives satisfaisantes pour s’attaquer à l’insuffisance des avoirs extérieurs nets en juin 2018. Les administrateurs souscrivent aussi aux nouvelles assurances qui figurent dans la lettre de suivi du gouverneur de la BEAC datée de décembre 2018 : il s’agit de réaliser l’accumulation prévue des avoirs extérieurs nets sur la base de l’engagement pris par la BEAC de mettre en œuvre une politique monétaire suffisamment restrictive et des engagements pris par les pays membres de mettre en œuvre des politiques d’ajustement dans le contexte de programmes appuyés par le FMI. Les administrateurs soulignent que la mise en œuvre de ces assurances reste essentielle pour garantir le succès des programmes appuyés par le FMI dans les pays membres de la CEMAC.
« Les vues exprimées par les administrateurs aujourd’hui feront partie des entretiens relatifs aux consultations au titre de l’article IV avec les pays membres de la CEMAC qui se dérouleront d’ici le prochain examen des politiques communes de la CEMAC par le conseil d’administration. Il est prévu que le prochain examen des politiques communes de la CEMAC se déroulera selon le cycle standard de 12 mois. »