Tribune / Pour un budget qui parle au peuple

Par Ike NGOUONI AILA OYOUOMI *
Président d’AÏLA, Cabinet de conseil stratégique

« Le Projet de Loi de Finances 2026 s’impose d’emblée par son ampleur et la rigueur de son architecture.
Avec un montant global de 7 233,3 milliards de FCFA, il exprime la volonté d’un État de remettre de l’ordre dans ses comptes, de consolider la confiance et d’inscrire la dépense publique dans une logique de performance.
Les chiffres parlent d’eux-mêmes : 4 327 milliards de recettes3 569 milliards de dépenses de fonctionnement3 321 milliards d’investissement.
La machine budgétaire paraît maîtrisée, la trajectoire cohérente.

Mais un budget n’est pas qu’un exercice de comptabilité : c’est aussi un acte de société.
Et la vraie question demeure : à qui parle ce budget ?
Aux institutions ? Aux bailleurs ? Aux citoyens ?
Car un État peut être solvable sans être audible.
Il peut afficher la transparence sans parvenir à la rendre lisible.

Sous l’autorité de Son Excellence Brice Clotaire Oligui Nguema, Président de la République, le gouvernement a entrepris de redresser les comptes publics et de restaurer la crédibilité financière de l’État.
La suppression des ordonnances de paiement antérieures à 2023, la généralisation de la facturation électronique normalisée, ou encore l’introduction du budget base zéro constituent des jalons structurants d’une réforme profonde de la gestion publique.

La dynamique institutionnelle engagée lors du Conseil des ministres du 23 octobre 2025 en renforce la cohérence :
la réorganisation du ministère de l’Économie, des Finances, de la Dette et des Participations – désormais doté d’une Inspection générale et d’une Direction centrale du management et de la qualité – vient consolider les fondations d’un État plus efficace, mieux piloté et plus transparent.
Le PLF 2026 devient ainsi le premier budget de la Cinquième République, celui d’une gouvernance budgétaire repensée, inscrite dans la rigueur et la responsabilité.

L’innovation la plus notable réside sans doute dans la réorientation de la fiscalité :
le PLF 2026 introduit une contribution pour l’amélioration du cadre de vie (prélevée à 9 % sur les factures d’électricité), refond la contribution foncière unique (CFU) et instaure de nouvelles taxes environnementales sur les plastiques, lubrifiants et déchets industriels.

Ces réformes traduisent la volonté d’un État qui veut responsabiliser sans punir, réguler sans étouffer.

Elles s’inscrivent désormais dans un environnement plus large de réformes économiques : encadrement du crédit, professionnalisation des administrateurs publics et création d’un statut d’investisseur résident pour tout apport supérieur à 10 milliards FCFA.
Autant de signaux d’un budget orienté vers la confiance et la relance productive.

Pour autant, cette transformation technique n’aura de portée que si elle s’accompagne d’une transformation sociale.
La rigueur, aussi nécessaire soit-elle, ne doit pas devenir un horizon fermé.

Elle doit produire de la confiance, pas de la distance.

Les citoyens doivent pouvoir percevoir, dans chaque réforme, un bénéfice concret : une commune mieux équipée, un service public plus proche, une charge fiscale plus équitable.

Dans une société où la défiance a souvent pris le pas sur la cohésion, la transparence budgétaire doit devenir une méthode de lien social.

Un budget ne devrait plus seulement être présenté, mais expliqué ; non plus seulement voté, mais partagé.
L’État a su reprendre la parole comptable ; il lui faut désormais retrouver la parole citoyenne.

Le PLF 2026 restera comme le budget de la rigueur retrouvée.
Mais il peut devenir aussi le budget de la maturité, s’il parvient à relier la discipline financière à la dignité sociale.
Un État moderne ne se mesure pas seulement à la justesse de ses comptes, mais à la justice de ses choix.
La stabilité des chiffres ne remplace pas la stabilité des vies.

Le moment est venu de conjuguer la rigueur du banquier et l’humanité du bâtisseur.
Nous savons équilibrer les comptes ; il nous faut désormais apprendre à équilibrer les destins.

Un budget n’est pas seulement une affaire de chiffres. C’est une affaire de citoyens ».

  • Ike NGOUONI AILA OYOUOMI est Président d’AÏLA Cabinet de conseil stratégique.
  • Il accompagne les institutions et les entreprises dans leurs stratégies d’influence, de communication et de gouvernance publique.

apropos de l auteur

La Redaction

Laisser un commentaire