DIG/ Au plus fort des délestages que subissent les populations du Grand Libreville, l’affaire du navire turc Karpowership est sur toutes les lèvres depuis l’audition à la Commission nationale de lutte contre la corruption et l’enrichissement illicite, du ministres des Comptes publics (Charles M’Ba) et de l’ex-ministre de l’Economie (Mays Mouissi).
Selon les dernières révélations de l’hebdomadaire Jeune Afrique, ce contrat, désormais présenté comme léonin, « a été négocié par l’ex-ministre de l’Énergie, Jeannot Kalima qui, accompagné d’une délégation de fonctionnaires du Palais de bord de mer, s’est rendu à Ankara au premier trimestre 2024.
Selon nos informations, les cadres de la (SEEG), n’ont pas pris part aux négociations.
Une note de la direction générale de l’Énergie (DGE) adressée le 22 novembre 2024 au représentant gabonais de Karpowership a néanmoins jeté un pavé dans la mare et remis en question ce choix. Le document pointe notamment de « nombreuses insuffisances relevées dans la mise en œuvre » du projet. Surtout, selon plusieurs sources concordantes, les coûts du contrat avaient été jugés élevés par la SEEG qui avait confié aux autorités ne pas être en mesure de l’honorer, et ce bien avant sa signature.
Des simulations ont démontré que l’offre turque est techniquement plus compétitive que la solution britannique.
Il apparaît dans cette étude qu’à quantité de gaz égale, la production de Karpowership est supérieure à celle d’Aggreko de 40 % une option qui permettrait au gouvernement de faire une économie de 362 millions de dollars sur les cinq premières années.
Mais ce schéma ne tient plus si l’électricité est produite avec l’utilisation du fioul lourd, un combustible privilégié dans un premier temps pour les centrales flottantes de Karpowership. Contactée, l’entreprise turque n’avait pas répondu à nos questions à la publication de cet article.
Les autorités gabonaises avaient pourtant été prévenues que l’usage de ce combustible allait faire exploser les coûts de plus de 12 milliards de francs CFA (plus de 18 millions d’euros) par mois, de quoi continuer de mettre Libreville en difficulté financière.
Malgré ces mises en garde, le ministre Jeannot Kalima a tenu à signer ce contrat. Selon nos informations, celui-ci a également été paraphé par le ministre de l’Économie,Mays Mouissi – il a été rétrogradé à l’Environnement début janvier –, le ministre du Budget et des Comptes publics, Charles Mba, ainsi que par le numéro deux de la SEEG, le colonel Guy Georges Ngamamba, pressés de résoudre le récurrent problème des délestages.
Malgré les nombreuses pressions subies, l’ex-patron de la SEEG, Joël Lehman Sandoungout s’est abstenu de signer ce contrat qu’il jugeait peu favorable aux intérêts de l’État.
Pourquoi avoir choisi l’option Karpowership malgré les coûts élevés ? C’est ce que tente de comprendre la Commission nationale de lutte contre la corruption et l’enrichissement illicite (CNLCEI) qui a ouvert une enquête sur les conditions d’attribution de ce contrat.
En attendant, le contrat d’Aggreko a été prolongé par tacite reconduction. En effet, Libreville n’a pas dénoncé le contrat six mois avant son terme ».
(Source : Jeune Afrique)