DIG/ C’est une information passée presqu’inaperçue mais qui pourrait faire l’effet d’une bombe.
D’après le site spécialisé « Sika Finance », réputé pour être la référence économique en Afrique de l’ouest, pour le reste de l’année 2024 et jusqu’à fin 2025, les banques en activité dans la CEMAC doivent disposer de fonds propres plus importants pour couvrir le risque de crédit lorsqu’elles prêtent à un Etat de la région.
C’est la substance, indique le média, d’une lettre circulaire signée le 18 octobre 2024 par le directeur général de la COBAC et adressée aux établissements de crédit.
Le régulateur bancaire fixe les taux de pondération par Etat sur la base du respect des critères de convergence.
Ainsi, ce taux est de 80% pour le Congo, 85% pour la Guinée Equatoriale et la RCA ; 90% pour le Cameroun et le Tchad, et… 100% pour le Gabon.
« Ça signifie que lors des émissions obligataires sur le marché régional, par exemple, une banque qui investit 1 milliard FCFA sur un titre du Cameroun doit disposer dans ses fonds propres d’au moins 900 millions FCFA pendant toute la durée de vie du titre. C’est énorme, car ça va affecter le bilan des banques qui soutiennent l’Etat dans ses opérations financières », a commenté un banquier joint par Sika Finance.
Depuis 2010, un dispositif réglementaire considère que le non-respect par un Etat de chacun des critères de convergence communautaire constitue un risque de crédit pour le système bancaire.
Ainsi, le taux de pondération est de 65% lorsqu’un pays accumule des arriérés sur sa dette ; 20% lorsque le solde budgétaire est supérieur ou égal à -1,5% ; 10% lorsque la dette publique dépasse 70% du PIB (et qu’il n’a pas d’arriérés) et 5% lorsque le taux d’inflation est supérieur au seuil communautaire de 3%.
Risque systémique
Après analyse de la situation économique et budgétaire des pays de la région, la COBAC révèle qu’aucun d’eux ne respecte le critère de non-accumulation des arriérés.
Le Congo est le seul qui a un solde budgétaire excédentaire tandis que le seuil d’inflation n’est effectif qu’en Guinée Equatoriale et en RCA.
Le Cameroun ne respecte qu’un seul critère, celui qui taux d’endettement, et le Gabon est en infraction sur la totalité des exigences.
Ces manquements se reflètent donc logiquement sur les pondérations qui leur sont attribuées.
« Ca veut dire que le niveau de risque est très élevé et les ressources affectées aux crédits envers les États va diminuer », a réagi un expert Gabonais.
Pour le banquier et consultant camerounais Ange Ngandjo, les conséquences peuvent encore être plus dramatiques.
« Les liquidités se feront de plus en plus rare la période fin 2024 et 2025. Ceci affectera la capacité des banques à prêter aux agents économiques ou à investir dans d’autres actifs. Causant de fait un ralentissement de l’économie. Toute banque ayant une exposition importante sur un état, pourrait être plus vulnérable aux chocs économiques ou aux crises souveraines, affectant ainsi sa stabilité financière.
Le critère de convergence « solde budgétaire de référence » de la lettre circulaire, nous renseigne que les États de la CEMAC majoritairement (à l’exception du Congo) dépensent plus qu’ils ne génèrent de revenus. L’expression d’une mauvaise gestion financière de ceux-ci ; une dépendance excessive à l’emprunt ou un manque d’efficacité dans la collecte des recettes fiscales. Mettant les États en incapacité d’honorer leurs engagements futurs, d’où la pondération élevée pour préserver les banques des défauts de paiements » a-t-il prévenu.