Franck Ping : « Les convictions au Gabon se monnaient pour quelques millions de FCFA » (2e Partie)

DIG/ Dans la seconde partie de cet entretien exclusif, l’homme d’affaires Franck Ping évoque la présidentielle de 2023, les chances de l’opposition et les manoeuvres du pouvoir. Mais également les défections au sein du camp politique de son père Jean Ping…

Entretien (2e partie)

Direct Infos : L’élection présidentielle de 2023 arrive à grand. Comment appréhendez-vous ces futures joutes électorales ? L’opposition, extrêmement divisée, a t-elle, selon vous, une once de chance de faire basculer le scrutin en sa faveur ?

Franck Ping : Jean Ping a présenté la formule mathématique gagnante lors de la dernière échéance présidentielle en 2016. Elle est très simple. Cette formule repose sur une fédération « réelle » de tous les partis d’opposition face au rouleau compresseur qu’incarne le Pouvoir. Le seul moyen de remporter ce scrutin sera de soutenir une candidature unique de l’opposition. Sans fédération, l’échec est garanti. JE PERSISTE ET SIGNE.

Nombre d’individus moquent Jean Ping, nombre le disent trop vieux ou trop seul, mais peu supporterait un échantillon du portefeuille de sanctions qui l’assaillent encore aujourd’hui.

On assiste depuis 6 ans à un fascinant ballet de « valseurs politique » dans ce pays. Les convictions au Gabon se monnaient pour quelques millions de francs cfa.  Il manque au Gabon des hommes politique de conviction.

Il manque au Gabon des hommes braves. Il manque à ce pays des hommes qui n’ont pas peur de perdre leurs privilèges.

Jean Ping est né avec les manches retroussées, prêt à se battre pour que les intérêts de son peuple soient défendus. Chez nous, les vestes ne se retournent pas, la doublure n’est pas en option !

Direct Infos: La majorité des soutiens de votre père, Jean Ping, ont rallié le parti au pouvoir. L’un des plus emblématiques, Jean Eyéghé Ndong, a même annoncé qu’il va soutenir la candidature et faire la campagne d’Ali Bongo Ondimba.  Comment vivez-vous personnellement cette situation ?

Il y a des hommes qui prêchent Dieu au réveil et louent le diable avant de se coucher.

Depuis Abidjan, j’assiste à un mercato de « valseurs politiques» prêts à tout pour ne pas perdre les avantages que confèrent les arcanes du pouvoir. Le peuple Gabonais n’est pas dupe ! La politique au Gabon est un marché ou la conviction est une variable décroissante du Franc cfa.

J’ai cessé de dénombrer tous ceux qui ne connaissent pas la honte dans ce pays. Le parfum de la trahison et le goût du déshonneur font partie du jeu politique depuis que Rome est Rome. Sauf qu’au Gabon, l’hypocrisie est telle que la plupart d’entre eux ne font même plus semblant d’être sincères.

Je vis très bien cette situation car honoré d’être le fils d’un homme qui ne négocie pas sa vision contre une poignée de Francs Cfa.

Direct Infos :  Ces défections ne sont-elles pas le signe de la mort politique de Jean Ping ? Où, est-ce selon vous, le simple désir de se refaire une santé financière après des années de disette ? Voyez-vous une certaine forme d’ingratitude ou encore de trahison de ces hommes politiques ?

Bien au contraire. Toutes ces forfaitures ne viennent qu’incarner le manque de sérieux dont ils sont coupables. Un jour ou un autre, certains feront preuve de résipiscence et exprimeront leurs regrets au peuple gabonais. Le seul juge des politiques, c’est le peuple.

La trahison nous en avons l’habitude, c’est devenu une marque de fabrique au Gabon.

Direct Infos : En  cas de retraite politique de votre père, Frank Ping est-il prêt à prendre la relève ? Dans ce cas, songerez-vous à discuter ou à négocier avec le pourvoir en place pour effectuer votre retour au pays ?

On est tous le fils ou la fille de quelqu’un. Mon père c’est Jean Ping, je soutiens chacun de ses combats, je célébrerai chacune de ses victoires et l’épaulerai dans la défaite si elle survient.

La notion de « relève » suppose de facto une hérédité idéologique transmise et non acquise. J’ai tout appris dans l’ombre de mon père, mais j’ai compris la vie à travers mon propre spectre, ma propre grille de lecture.

Je ne monnaierai jamais mes convictions, et mon retour au Gabon ne saurait être conditionné par une quelconque transaction monétaire.

Direct Infos : Lors de notre dernier entretien en 2019, vous aviez prédit que Noureddine Bongo Valentin sera candidat à l’élection présidentielle de 2023. En êtes-vous toujours aussi certain ?

Noureddine Bongo Valentin est la béquille de son père. Ce dernier étant dans l’incapacité physique de mener une campagne totale dans les neuf provinces du Gabon, son fils battra campagne pour lui. Les dernières décisions prises au sein du PDG semble accréditer cette thèse. De nombreux bouleversements ont eu lieu depuis notre dernière interview.

J’étais convaincu qu’il serait la tête de série présidentiable du PDG, mais le Patriarche Ali en a voulu autrement.

La fatidique échéance a lieu dans un peu plus d’un an. Je demeure persuadé que ce septennat ne nous a pas livré tout son lot de surprises.

Entretien réalisé par la rédaction de Direct Infos Gabon

 

 

 

 

 

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