En dépit de la crise économique qui touche tous les secteurs-clés de l’économie nationale, notamment la micro-finance, la Financière africaine de micro-projets (Finam) tient malgré tout à garder le cap grâce à plusieurs actions et mesures correctives qui lui permettent aujourd’hui d’en atténuer les effets et de se projeter vers l’avenir.
Entretien
La crise économique actuelle frappe aujourd’hui tous les secteurs de l’économie nationale. D’après un rapport de la Cobac, plusieurs établissements de micro-finance seraient, dit-on, actuellement dans le rouge. Est-ce le cas pour la Finam ?
Gilbert Mvé Assoumou : La crise économique que nous vivons depuis près de trois ans met à l’épreuve la capacité de résilience de notre établissement face à une situation de turbulence. Et j’entends par résilience, non pas la capacité de résister d’un seul bloc contre vents et marées, mais plutôt la capacité à se réorganiser de façon structurée, de façon à atténuer les effets de la crise et permettre que l’établissement continue à se développer et à se projeter dans l’avenir. Autrement dit, pour faire face à la crise, nous devons renoncer à la logique de ‘’business as usual’’, qui signifie continuer nos activités habituelles comme si de rien n’était, et adopter une démarche plus structurée qui intègre la gestion permanente de la crise afin de limiter le risque de défaillance de l’établissement. C’est ainsi que, dès le début de la crise, nous avons mis en place un processus de résilience qui comporte certaines mesures et actions correctives. A titre d’exemples, nous avons volontairement freiné les décaissements de crédits en limitant leur renouvellement aux anciens clients tout en s’abstenant des crédits progressifs. Nous observons une grande vigilance sur les crédits aux nouveaux clients. C’est également le cas de notre désengagement des segments de marchés devenus plus risqués à cause du lien direct à la conjoncture. Il en est ainsi des fournitures de services au secteur pétrolier et des BTP. Au-delà de la crise et en se projetant à l’avenir, nous envisageons une stratégie de Rebond multi-dimensionnelle qui intègre simultanément plusieurs volets. Celle-ci signifie que malgré la crise, nous n’allons pas renoncer à notre stratégie d’expansion. Elle se poursuivra à un rythme approprié et au moment opportun sur le plan local en même temps que le développement à l’international. Viennent ensuite s’ajouter la diversification vers des nouveaux-marchés de client et l’innovation pour les services offerts à notre clientèle cible. Nous y associerons également le développement d’une culture de vision à long terme. Car, les risques actuels provenant de la crise ne doivent pas nous faire perdre de vue les objectifs à long terme.
Dans ce contexte particulièrement difficile, est-ce que l’accompagnement des PME et le soutien à l’entreprenariat constituent encore une priorité dans votre stratégie de développement ?
La micro finance vise deux objectifs : financier d’une part et social d’autre part. Ceci étant, malgré la prédominance de la mission financière qui consiste à assurer la viabilité financière de l’institution en offrant des services financiers, les institutions de micro finance sont par essence sociales capables de combiner l’offre des services financiers et non financiers telle qu’une formation aux micros entrepreneurs. Dès sa création, Finam s’est inscrite dans l’accompagnement et le soutien des porteurs de micro activités qui génèrent des revenus. Par leur nature, les activités génératrices de revenus exigent une forte implication des micros entrepreneurs dans la mise en œuvre des activités. En effet, créer un microprojet suppose d’avoir des connaissances techniques ; une certaine capacité organisationnelle et de maîtrise des multiples tâches internes et envers les fournisseurs et clients. Pour une meilleure gestion de tous ces paramètres, ainsi que pour stimuler l’esprit d’entreprise, des actions de formation en faveur des personnes clé permettraient de développer leurs aptitudes entrepreneuriales. Ce qui renforcerait également l’activité elle-même. Par ce biais, notre établissement Finam offrira à certains clients sélectionnés, cet accompagnement qui permettrait de développer auprès d’eux des compétences techniques et managériales nécessaires à la gestion des activités génératrices de revenus ; de réussir durablement les projets en toute autonomie ; et de réduire le taux de cessation d’activités. Les critères de sélection feront l’objet d’une communication ultérieure par voix de presse.
Après douze ans de présence déjà dans le pays, on peut donc être rassuré que la Finam va continuer à fournir ses services au Gabon ?
Il faut dire, pour commencer, que Finam a obtenu son agrément du Ministère de l’Economie et des Finances en 2005 après avis conforme de la Cobac, lui conférant le statut de N°1 des Entreprises de micro finances (EMF) de 2ème catégorie au Gabon. Mais en réalité, Finam est née et bénéficie de l’expérience d’une coopérative d’entraide qui fonctionne sous forme associative depuis 1982. A ce jour, Finam compte 16 agences interconnectées fonctionnant en temps réel et réparties dans 6 provinces du Gabon. Finam Gabon, c’est 190 salariés au service de quelques 86 000 clients. 7 000 personnes sont bénéficiaires actuellement de nos crédits. Nos clients sont des commerçants, des associations, des fonctionnaires, de la Main d’œuvre non permanente des salariés du privé, des PME/PMI, qui bénéficient de nos gammes de produits diversifiés à savoir, épargne, crédit, change manuel, transferts d’argent. Donc, on peut dire que Finam Gabon se porte bien. Nous avons passé aisément la période de vulnérabilité des institutions de micro-finance qui est de 0 à 5 ans. Notre développement s’est accéléré par la suite. Le chemin parcouru a permis de se consolider graduellement. Il faut dire, par ailleurs, que la Finam a commencé, depuis l’année 2016, son internationalisation par le Togo, et y compte 8 agences à l’heure actuelle, et plus de 7 000 clients.
Votre mot de fin …
Malgré la crise, nous restons confiants. Cette confiance est avant tout le fruit de la longue expérience que nous avons du marché. Celle-ci sera renforcée par les nombreux enseignements que nous pourrons tirer de la crise.En tant que premier établissement de micro finance, avec la promotion du secteur, nous avons vécu l’entrée progressive de nouveaux acteurs sur le marché. Ce qui a quelque peu réduit notre part de marché à un moment donné. Mais nous admettons que la concurrence est bénéfique pour l’économie, car elle apporte au consommateur plus de choix parmi les opérateurs et contribue à la baisse des prix. De plus, elle incite Finam à être plus compétitive. Dans ce contexte, nous travaillons à la mise en place d’une dynamique qui est centrée sur le client et qui consiste à améliorer la qualité des produits et des services que nous leur offrons. Je demande donc à tous nos clients et partenaires de continuer à nous faire confiance. La période de crise que nous traversons permet de réaliser que Finam peut perdurer, même dans des conditions difficiles.
(Source : L’Union)